Acheronta  - Revista de Psicoanálisis y Cultura
Le séminaire Encore "de" Jacques Lacan
Comparaison de quatre versions
Norma Ferrari y Michel Sauval

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Première Partie:
Session du 21 novembre 1972

Nous avons choisi deux parragraphes de la première session du séminaire "Encore" où la comparaison des deux versions écrites et le registre sonore indiquent des différences qui afectent la lecture du texte.

Pour l'indication de la place des textes nous avons suivis la numération de l'edition Seuil.

Les guillemets et italiques son des editions indiquées.
Les negritas indiquent, dans chaque version, ce qui remarcablement (a notre avis) manque sur l'autre.

Page 9

Edition Seuil Edition critique
Ce qui, depuis quelque temps, me favorise, c'est qu'il y a aussi chez vous, dans la grande masse de ceux qui sont là, un je n'en veux rien savoir.

Seulement, tout est là, est-ce bien le même?
Vôtre je n'en veux rien savoir d'un certain savoir qui vous est transmis par bribes, est-ce de cela qu'il s'agit chez moi?. Je ne crois pas, et c'est bien de me supposer partir d'ailleurs que vous dans ce je n'en veux rien savoir que vous vous trouvez liés à moi.

De sorte que, s'il est vrai qu'à votre égard je ne puis être ici qu'en position d'analysant de mon je n'en veux rien savoir, d'ici que vous atteigniez le même il y aura une paye.

C'est bien ce qui fait que c'est seulement quand le vôtre vous apparait suffisant que vous pouvez, si vous êtes de mes analysants, vous détacher normalement de votre analyse.

J'en conclus qu'il n'y a, contrairement à ce qui s'émet, nulle impass de ma position d'analyste avec ce que je fais ici.

Il y a quelque chose, depuis quelque temps, qui me favorise, c’est qu’il y a aussi chez vous, chez la grande masse de ceux qui sont là, un même, en apparence, un même «je n’en veux rien savoir».

Seulement tout est là, est-ce le même ? le «je n’en veux rien savoir» d’un certain savoir qui vous est transmis par bribes. Est-ce bien de cela qu’il s’agit ? Je ne crois pas.
Et même, c’est bien parce que vous me supposez partir d’ailleurs dans ce «je n’en veux rien savoir» que ce supposé vous lie à moi.

De sorte que s’il est vrai que je dise qu’à votre égard je ne puis être ici qu’en position d’analysant de mon «je n’en veux rien savoir», d’ici que vous atteigniez le même, il y aura une paye,
et c’est bien ce qui fait que c’est seulement que,
quand le vôtre vous apparaît suffisant,
vous pouvez, si vous êtes, inversement de mes analysants, vous pouvez normalement vous détacher de votre analyse.

Il n’y a, contrairement à ce qui s’émet, nulle impasse de ma position d’analyste avec ce que je fais ici à votre égard.

Les rédactions de chaque version sont très differentes. Nous me marquerons que quatre de ces différences.

1 - Le "vôtre" et "chez moi" n'existent pas, ni dans l'édition critique ni dans le registre sonore.
L'édition critique dit "le je n'en veux rien savoir". Il ne s'agirait donc pas du "mien" et du "votre", mais d'une fonction du discours. A quel niveau se joue-t-il le "je" de ce "je n'en veux rien savoir"?

2 - Pouvons nous considerer superflue la modulation "que je dise"?

3 - Mais surtout, le point central, à notre avis, de la comparaison de ce parragraphe, est l'exclusion, dans la version Seuil, du mot "inversement". L'enregistrement sonore pourtant est clair (pour l'écouter il suffit d'avoir installé le plug-in de Real Player, disponible gratuitement)

Que veut dire se détacher "normalement" d'une analyse? C'est quoi ce "normalement"?
Le fait est que, quoi que ce soit, cela implique, de toutes façons, une modalité de fin d'analyse.

Selon la version Seuil, ou l' "inversement" a disparu, cette modalité de fin de d'analyse est posée en ces termes: les analysants de Lacan à qui "leur" je n'en veux rien savoir (et non pas la paye, puisque Lacan dit "le" vôtre et non pas "la" vôtre) apparaitraient "suffisant" pourraient se détacher "normalement" de leur analyse.

Si nous incluons l' "inversement", deux possibilitées sont ofertes, selon que nous placions, ou pas, une virgule après "inversement" (la possibilité est ouverte, car sur l'enregistrement sonore vous écouterez une pause très brieve après "inversement"):

4 - Finalement, Seuil ajoute un "J'en conclus que" avant le dernier parragraphe
Cela constitue un pont avec ce qui suit en termes de justification: cette modalité de fin d'analyse justifierait, ainsi, qu'il n'y ait pas d'impasse entre la position d'analyste de Lacan et la position qui résulte de ce qu'il fait au séminaire: analysant de son "je n'en veux rien savoir".

Ce "J'en conclus", n' existe pas ni dans l'edition critique ni au registre sonore.
Dans ce cas la phrase pourrait faire réfèrence à tout le paragraphe et non seulement a la question du détachement de l'analyse. Quand Lacan dit : ... c'est bien parce que vous me supposez partir d'ailleurs dans ce "je n'en veux rien savoir" que ce supposé vous lie à moi, n'est il pas en position d'analyste par rapport a cette suposition de savoir ?

Page 11

Edition Seuil Edition crítique
Je sors, et une fois de plus, j'écrirai sur la porte, afin qu'à la sortie, peut-être, vous puissiez resaisir les rêves que vous aurez sur ce lit poursuivis. J'écrirai la phrase suivante - La jouissance de l'Autre, de l'Autre avec un grand A, du corps de l'Autre qui le symbolise, n'est pas le signe de l'amour.

J'écris ça, et je n'écris pas après terminé, ni amen, ni ainsi soit-il

L'amour, certes, fait signe, et il est toujour réciproque.

Je sors, et une fois de plus j’écrirai sur la porte, dans la fin qu’à la sortie peut-être vous puissiez vous rendre compte des rêves que vous aurez sur ce lit poursuivis, la phrase suivante : la jouissance de l’Autre, de l’Autre avec… il me semble que depuis le temps ça doit suffire que je m’arrête là, je vous en ai assez rebattu les oreilles de ce grand A qui vient après, et que maintenant il traîne partout, ce grand A mis devant l’Autre, plus ou moins opportunément d’ailleurs, ça s’imprime à tort et à travers, la jouissance de l’Autre, du corps de l’autre qui Le, lui aussi avec un grand L, du corps de l’autre qui Le symbolise n’est pas le signe de l’amour.

J’écris ça, je n’écris pas après : terminé, ni amen, ni ainsi soit-il.

<Elle> n’est pas le signe, c’est néanmoins la seule réponse. Le compliqué c’est que la réponse elle est déjà donnée au niveau de l’amour, et que la jouissance de ce fait reste une question, question en ceci que la réponse qu’elle peut constituer n’est pas nécessaire d’abord. Ce n’est pas comme l’amour.

L’amour, lui, fait signe et, comme je l’ai dit depuis longtemps, est toujours réciproque.

Dans ce parragraphe deux différences nous sembles importantes.

1- Premièrement, la possibilité d'écrire "corps de l'autre", avec "autre" en minuscule.
Tel que le signale une note au bas de page de l'édition critique "Il n’y a aucun témoignage de l’écriture de cette phrase, pas plus sur la porte qu’au tableau. Nous la considérons toutefois comme un écrit et la transcrivons en italiques. Lacan revient constamment à cette phrase, dans cette séance ainsi que dans les suivantes. Nous avons pris le parti d’écrire régulièrement jouissance de l’Autre avec un grand A puisque Lacan est très explicite sur ce point, et jouissance du corps de l’autre avec un petit a puisqu’il s’agit cette fois de l’autre qui Le symbolise, précisément ce grand Autre".
L'enregistrement sonore est clair ici aussi: on écoute dire "Le, lui aussi avec un grand L", ce qui justifie d'écrire le "corps de l'autre" avec minuscule.

2 - Tout un fragment est eliminé dans l'edition Seuil.
L'indication "<Elle>" pour le début de ce fragment, dans l'édition critique, indique qu'une décision est à prendre, car sur
L'enregistrement sonore on entend "Il", ce qui reporterait ce fragment à l'amour et pas à la jouissance.
L' édition critique propose écrire "Elle".

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Revista de Psicoanálisis y Cultura
Número 12 - Diciembre 2000
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